Tribune de Genève – 23/08/2015
Les monocycles électriques doivent désormais être immatriculés,une exception suisse. Les revendeurs grimacent.
Nicolas Saramon, revendeur de monocycles électriques, déplore la décision de Berne d’interdire ces véhicules sur les trottoirs: «Notre place n’est pas sur la route, on est vulnérable car sans protection.»
On commence à en apercevoir de plus en plus, filant dans les rues, perchés sur une roue, cheveux aux vents, droits comme des I. Ce sont des «superpiétons», qui sillonnent la ville sans efforts sur leur monocycle électrique. Soit un engin motorisé affublé d’une roue gyroscopique qui peut atteindre 20 km/h et coûte généralement près de 2000 fr.
Jusqu’à il y a quelques mois, un flou législatif entourait l’utilisation de ces engins. Mais depuis le 1er juin, l’Office fédéral des routes (Ofrou) a décidé de cantonner ces monoroues et leur cousin à deux roues, le Segway, aux routes et aux pistes cyclables. Terminé le slalom sur les trottoirs et les zones piétonnes.
Une décision que déplore Nicolas Saramon, revendeur de monocycles électriques de la marque Solowheel à Genève depuis trois ans. «Cet engin est prévu essentiellement pour être utilisé sur les trottoirs et autres zones piétonnes comme les parcs, en roulant à une vitesse adéquate. Dans tous les autres pays européens, c’est toléré! Notre place n’est pas sur la route, on est vulnérable car sans protection, c’est dangereux.» L’Ofrou justifie sa position: «Nous pensons à la sécurité des personnes les plus vulnérables, indique Thomas Rohrbach, porte-parole. Un engin qui peut rouler à 20 km/h représente un danger pour ces personnes sur les trottoirs et autres zones piétonnes.»
Autre exigence de l’Ofrou: le monocycle électrique devra être doté d’une plaque d’immatriculation. Un vélo électrique qui file à 20 km/h n’a pas besoin de plaque, alors que le monoroue qui file à ses côtés à la même vitesse, oui? «Pour ce qui concerne les aspects techniques et l’admission à la circulation, les gyropodes (ndlr: cette catégorie inclut les monocycles) sont assimilés aux vélos électriques rapides (45 km/h), explique Gabriele Crivelli, également porte-parole de l’Ofrou. Les gyropodes disposent de moteurs relativement puissants et sont beaucoup plus lourds que les e-bikes lents. Ils posent donc des risques plus grands pour les personnes. Pour cette raison, il faut porter cette plaque qui implique la présence d’une assurance.»
Une roue électrique ou un Segway roulant à un maximum de 20 km/h sont donc considérés comme plus dangereux qu’un e-bike plafonnant à la même vitesse. Pour Nicolas Saramon, cette exigence de l’Ofrou menace l’avenir des monocycles électriques. Car on n’obtient pas une plaque d’immatriculation d’un claquement de doigts. «Il faut que l’engin soit homologué en Suisse, or il ne l’est pas, explique-t-il. Pour qu’il le devienne, il faut une évaluation de conformité délivrée par un office de contrôle ou un certificat de conformité généré par le fabricant. Ces procédures sont compliquées et onéreuses. Un fabriquant n’a aucun intérêt à se lancer dans une telle procédure pour le petit bassin de clients en Suisse…»
Le revendeur conclut: «L’engin commençait à prendre son essor, j’avais de plus en plus de demandes, en trois ans j’en ai vendu 50. Mais avec cette nouvelle législation, c’est la fin des monocycles électriques.»