Le Parisien – 22/09/2016
Thomas Saintourens
Mi-scooters mi-voiturettes, de nouveaux véhicules propres et compacts permettront de limiter la consommation d’énergies fossiles tout en fluidifiant le trafic.
Le designer chinois Ken Chen croit avoir trouvé un remède aux embouteillages : un véhicule futuriste, baptisé Maglev Urban Commuter (MUC, voir page précédente). Cette sorte d’œuf roulant à deux places utilise l’énergie électrique et des moteurs à sustentation magnétique placés dans ses roues qui lui permettent de glisser sur l’asphalte en limitant au maximum les frottements. Pour mettre au point son engin, Ken Chen a interrogé des citadins souvent coincés au volant sur leurs besoins. « La demande de mobilité crée deux problèmes à régler d’urgence : la pénurie de carburants fossiles et la limitation de l’espace urbain », analyse-t-il. A ses yeux, la conception d’un véhicule doit se limiter au « strict minimum », permettant le transport. Il a alors imaginé un concept qu’il appelle pod (capsule), à mi-chemin entre le scooter et la petite citadine. Et il a créé son MUC, qui allie praticité et simplicité, écologie et compacité. Selon le créateur, l’engin pourrait prendre la route « dans les années 2030 » et remplacer les grosses cylindrées qui engorgent les métropoles.
Un deux-roues primé au concours Lépine
En attendant, les scooters ont déjà commencé leur mue, en passant du moteur thermique au moteur électrique. Leur design reste classique mais, petit à petit, leur autonomie augmente (désormais aux alentours des 100 kilomètres pour une charge) grâce à des innovations malines. L’entreprise française Eccity a ainsi été lauréate du concours d’inventions Lépine cette année pour son modèle Artelec, fabriqué à Grasse et équipé d’une « boîte noire » : un système de capteurs couplé à une application qui permet de connaître, en temps réel, les données du scooter afin d’optimiser son efficacité énergétique (niveau de batterie, énergie consommée, température…). Un nouvel argument de vente ? Pas encore, de l’aveu de Frédéric de Manneville, directeur d’Eccity : « La base pour le client demeure la sécurité, la disponibilité de l’énergie arrive en deuxième position. » Mais à terme, le succès de ce modèle dépendra de la facilité d’accès aux bornes de recharge et de l’autonomie du véhicule.
Des modèles ultra-légers, voire pliables
Plusieurs experts font le pari que l’avenir n’appartiendra pas aux grosses berlines autonomes, mais bien aux petits formats légers. C’est le cas du chercheur au Massachusetts Institute of Technology (MIT) William J. Mitchell, dans son ouvrage Reinventing the Automobile (2010), ou du Français Nicolas Meilhan, consultant au cabinet Frost & Sullivan. « La diminution de l’emprise au sol constitue l’argument fondamental de la mobilité urbaine de demain », soutient ce dernier. Parmi les vainqueurs, les vélos à assistance électrique et toute une gamme de véhicules peu gourmands, de la trottinette électrique pliable aux pods, dont les dimensions sont restreintes. « Un bon exemple vient du PodRide, cite Nicolas Meilhan, un prototype suédois de 1,80 mètre de long pour 75 centimètres de large, homologué aussi pour les pistes cyclables. Les technologies, nous les avons déjà. La réponse doit venir de politiques courageuses concernant les infrastructures, avec le développement de voies réservées, ou des interdictions ciblées. » La Norvège, pionnière en matière de véhicules électriques, entend ainsi interdire la vente de modèles à essence dès 2025 (le Parlement néerlandais l’envisage au même horizon). De quoi faire décoller la demande pour les scooters propres.
Comme une voiturette de golf
En coulisse, les géants des deux-roues s’activent pour ne pas rater ce virage. Honda, numéro un mondial, imagine des machines qui n’ont plus rien à voir avec les scooters traditionnels. « On pense la mobilité au sens large, explique Fabrice Recoque, directeur de la division moto chez Honda France. L’U3X, par exemple, est un monocycle électrique que l’on peut utiliser aussi pour se déplacer à l’intérieur d’un grand bâtiment. » Autres exemples de la marque : les Wander, deux modèles de Honda présentés au salon de Tokyo 2015. L’un – le Wander Stand – est une sorte de scooter à quatre roues des plus minimalistes ; l’autre – le Wander Walker (photo ci-contre) – ressemble à une voiturette de golf dont le pare-brise est un écran de réalité augmentée. « N’oublions pas toutefois les réglementations de circulation, par exemple pour un véhicule capable d’aller sur la route ou sur le trottoir », tempère Fabrice Recoque, qui n’imagine pas que ces produits circulent avant une dizaine d’années.