Les Numériques – 15/05/2015
Bruno Labarbere
Sous ses airs de clone un peu bâclé de SoloWheel noir et rouge, la petite Gotway 14″ 680W ne paye pas de mine. Pourtant, il ne faut pas s’arrêter aux premières impressions : des qualités, elle en regorge, à commencer par une étonnante autonomie annoncée « entre 45 et 50 km ». Vraiment ? Vérifions cela ensemble…
CARACTÉRISTIQUES
– Autonomie annoncée 50 km
– Batterie 680
– Poids 11.8 kg
– Temps de charge 5 h
– Vitesse maximale
– Puissance du moteur
PRÉSENTATION
La roue Gotway 14″ 680W, comme son nom l’indique, a pour spécificité d’utiliser une roue à chambre à air de 14 pouces de diamètre (356 mm) et une batterie de 680 Wh — en fait, deux batteries de 340 Wh réparties de part et d’autre de la roue. Bien que moins puissante que la Solowheel 1500 W S300, notre roue de référence, elle se targue pourtant d’une vitesse maximale de 27 km/h et d’une autonomie de 50 km (70 km selon le constructeur). Un optimisme certain qui ne demande qu’à se confronter aux rues parisiennes.
CONFORT ET ERGONOMIE 4/5
De vous à nous, la première impression laissée par la Gotway 14″ 680W — G14-680W dans la suite du test — ne peut pas réellement être qualifiée de « coup de foudre ». Ce serait même plutôt l’inverse. Alors que la SoloWheel jouit d’une certaine élégance minimaliste harmonieuse, alors que l’InMotion V3 se distingue par un design très travaillé qui ne laisse pas indifférent, alors que la Ninebot One est tout simplement sublime, la G14-680W ressemble à un vilain petit canard. Pire que cela : elle ressemble à un Solowheel qui aurait eu des problèmes de croissance et qui aurait compensé en prenant du ventre. Pas franchement glamour ni excitant, d’autant plus que les batteries occupent 172 mm de largeur. Un monstre, dont vous vous demandez bien comment vous allez parvenir à le caler entre les mollets. Surtout, vous craignez d’avance de devoir finir vos jours à marcher comme un cow-boy, les jambes arquées. Minute glamour (bis). Et la mauvaise première impression continue : les supports de mollets sont extrêmement rigides. Pour cause : seule une fine pellicule de caoutchouc (amovible) de 5 mm sépare vos jambes de la carcasse de la roue. Il faut souffrir et donner de sa personne pour conquérir le cœur de la belle qui, pour l’heure, est plus crapaud que princesse.
Passent une journée et les dix premiers kilomètres. Finalement, vous vous dites que vous y êtes allés un peu fort et auriez pu vous montrer un peu plus courtois, surtout pour un premier rendez-vous. Enfin, une première rencontre. Bon, vous avez encore un peu mal aux mollets et aux tibias, mais vous vous dites que c’est parce que vous n’avez pas encore trouvé la bonne position. Puisque l’amour vient avec le temps, vous reconnaissez quand même certaines qualités à cette G14-680W. Certes, il est délicat de partir sur un seul pied en calant votre tibia contre la roue, mais ce n’est qu’une histoire de technique. Par rapport à une Solowheel ou une InMotion V3, vous vous félicitez que la charge de la batterie soit rappelée par quatre diodes rouges, à droite de la poignée, sur la partie supérieure de la roue. Ainsi, elles restent toujours visibles. Pas très élégantes, pas franchement visibles, mais simples et efficaces. Juste derrière se trouve la prise à trois broches, protégée par une vulgaire protection en caoutchouc : toujours pas élégant, toujours pas glamour, mais simple et efficace. Et puis, pendant les 5 heures que dure une charge complète, vous avez le temps de vaquer à vos occupations… pour peu que vous ne restiez pas trop près du chargeur, dont le ventilateur émet un souffle continu assez agaçant. Autre bizarrerie, les diodes du G14-680W ne s’allument pas progressivement pour vous indiquer le niveau de la charge. C’est un peu dommage et flou en termes d’informations.
Il ne faut pas compter sur l’austérité de la G14-680W pour vous proposer un écran LCD, pour vous proposer des enceintes intégrées, pour proposer une application de monitoring pour votre terminal mobile… point de tout cela. Il n’y a même pas de poignée télescopique, intégrée ou non. C’est pourtant si pratique ! Les repose-pieds, quant à eux, du fait de la largeur du corps central, semblent encore plus courts que ceux d’une Solowheel. Pourtant, vous parvenez assez facilement à repositionner vos pieds en roulant, et ça c’est chouette, d’autant plus que leur grip se révèle, au demeurant, excellent. Finalement, le tour du propriétaire est vite fait, tout aussi rapidement sont passées les premières mauvaises impressions et, pas non plus complètement conquis mais en passe de l’être, vous n’avez plus qu’une envie : rouler avec.
CONDUITE 4/5
Il y a une différence de taille entre la Gotway 14″ 680 W et toutes les roues qui nous sont passées entre les pieds, avec tests publiés ou non : les roues. Ici, c’est du 14 pouces (356 mm de diamètre). Ailleurs, généralement, c’est du 16 pouces, soit 406,4 mm de diamètre, soit un peu plus de 5 cm de différence sur le papier, mais qui changent tout sur le terrain. Nous vous ferons grâce de l’apprentissage, pour cela nous vous renvoyons sur notre test de la Solowheel 1500 W S300 : c’est quasiment la même chose. Quasiment, parce que quelques points diffèrent.
Qu’apporte une roue plus petite ? Au début, que des problèmes. Franchement, si tout se passait parfaitement dès les premiers instants, où seraient les frissons et l’excitation ? Nous vous le demandons. La G14-680W, donc, peut perturber au début à cause de sa petite roue, très sensible aux moindres mouvements de bassin et aux petites impulsions : elle tourne sans demander son reste et, au début, il faut un certain temps d’adaptation pour garder son cap. Mais après cinq minutes, tout rentre dans l’ordre et il ne vous reste plus qu’à apprécier les qualités de conduite de la G14-680W : franche, directe, honnête. Elle vous prend rarement en traître, voire jamais, sauf si vous la brusquez. Une roue plus petite permet également d’abaisser le centre de gravité, ce qui facilite le maintien du ralenti voire même, de manière non prolongée, la position statique. À moins que ce ne soit l’expérience et la mémoire musculaire qui n’entrent en jeu, mais il s’agit plus probablement d’un mélange des trois. En contrepartie, la prise au vent est plus prononcée, attention alors aux variations de cap non sollicitées.
Il y a quand même un léger, mais très léger, défaut quant à la conduite du G14-680W : son manque de puissance ou, en tous cas, de couple. Celui-ci se fait surtout sentir lorsque vous roulez sur des pavés, et encore plus sur des pavés en montée. Là, il faut ralentir le rythme et passer tout en douceur ou souplesse, alors qu’une Solowheel 1500 W S300 autorise un franchissement sans se poser de question. Si vous ne prenez pas cette précaution, vous vous pencherez trop en avant et le moteur aura du mal à vous retenir si vous roulez à plus de 12 km/h (environ). Ce n’est pas très grave dans l’absolu, mais il faut le savoir pour s’épargner de mauvaises surprises. Le moteur, par ailleurs, est très prévenant. Il émet un bip par seconde à 23 km/h, 2 bips à 25 km/h et nous n’avons jamais atteint les 3 bips, synonyme de rupteur, donc de chute. L’alarme se déclenche également lorsque l’angle d’inclinaison dépasse les 30° sur l’axe horizontal et 45° sur l’axe vertical, ce qui laisse quand même beaucoup de marge pour effectuer les virages très serrés. Enfin, si vous en avez le courage et les genoux, vous pourrez descendre des trottoirs de 10 cm. La roue ne se met à tourner sur elle-même toute seule que si vous soulevez la machine plusieurs secondes. Théoriquement, mais cela ne nous est également jamais arrivé, l’alarme se met en route si la carte mère atteint les 70°C.
En termes de conduite, pour conclure, la GotWay 14″ 680 W est sans peur et presque sans reproche, si ce n’est son léger manque de puissance qu’il faudra surveiller sur les terrains chaotiques (gros pavés, racines, etc.) et son accélération assez douce qui ne permettra des dépassements francs.
AUTONOMIE 5/5
Si nous devions choisir un mot pour qualifier le test d’autonomie de la GotWay 14″ 680 W, nous opterions pour « épique ». Nous savions déjà que la G14-680W était endurante, non pas parce que Guillaume, le responsable de la boutique E-Roue nous l’avait dit le jour du prêt, mais parce que nous avions largement eu le temps, en un mois d’utilisation, de l’éprouver à travers des parcours biscornus : multiples allers-retours domicile/rédaction sur une seule charge, soirée Pantin/Porte de Clignancourt/Reuilly-Diderot/Stalingrad sans recharger, allers-retours dans Paris pour récupérer un appareil photo chez tel ou tel constructeur… Mais nous n’avions jamais mesuré l’autonomie exacte sur une seule charge, et donc la distance que la roue était capable de parcourir d’une seule traite.
Le soir où nous nous sommes lancé, il faisait très beau et plutôt chaud sur Paris, un peu plus de 26°C. Il était 19 heures lorsque nous avons quitté la rédaction, bien décidés à nous offrir une balade « carte postale » : longer la voie ferrée jusqu’à la Gare du Nord via la piste cyclable lisse et rectiligne, remonter à la Gare de l’Est pour récupérer la rue Lafayette et descendre jusqu’à Saint-Lazare, toujours sur une piste cyclable impeccablement entretenue. Là, bifurquer sur la droite et remonter le chaotique Boulevard Haussmann jusqu’à l’Arc de Triomphe. Un petit tour de la Place de l’Étoile et ses gros pavés, deux ou trois coucous aux touristes ébahis par notre destrier du futur, et, zou, descente en ligne droite des Champs Élysées et ses grosses dalles, option slalom de touristes jusqu’au jardin des Tuileries et sa terre battue. Comme cela ne suffisait pas, nous avons traversé le Louvre et ses pavés ronds, le Pont des Arts et ses traverses de bois, avons été secoués sur les irrégularités des quais de Seine, avons sympathisé avec des skateurs sur le parvis de Notre-Dames et, arrivés là, nous en étions toujours à quatre barres d’autonomie.
Las, nous avons pris la direction de la gare d’Austerlitz, via les quais, puis du musée de la Mode, direction Bercy, Gare de Lyon, quai de la râpée, pour finalement prendre la Bastille. Horreur, après plus de 20 km, la G14-680W venait à peine de descendre à trois barres, là où la plupart des roues et gyropodes que nous avons testés auraient depuis longtemps rendu l’âme. Alors nous avons continué : boulevard Richard Lenoir jusqu’à retrouver le Canal Saint-Martin et ses pavés, puis Jaurès, où, perturbés par tant d’endurance, nous avons voulu être un peu violents et tester les capacités de franchissement aux Buttes Chaumont. Nous y avons d’ailleurs croisé un Ninebot One, mais c’est une autre histoire. Finalement, nous avons fait demi-tour à la Porte de Pantin, sommes remontés jusqu’à la Place Stalingrad pour opérer un virage en épingle afin de nous frotter à la remontée du Canal de l’Ourcq. Juste après La Villette, parce qu’il nous restait encore trois barres de batterie, nous avons brusquement viré à droite pour nous diriger vers la Porte des Lilas et nous perdre en banlieue parisienne. Monter, descendre, ça va forcément l’épuiser la batterie… mais non, pensez-vous ! En plus, la Gotway semble se recharger en descente et au freinage. Bigre ! Après plus de 4 heures et demie de roulage continu et 43 km de montées, descentes, hésitations, nous avons jeté l’éponge et sommes rentrés nous reposer. Il restait encore deux barres de batterie.
Le lendemain matin, bien décidés à faire la peau à la G14-680W, nous sommes repartis sans plus ménager notre monture que la veille : Canal de l’Ourcq dans l’autre sens, en direction de la rédaction. Des pavés, du slalom, quelques centaines de mètres dans l’herbe histoire de vérifier que c’est possible. C’est seulement devant la rédaction que nous sommes parvenus à descendre à une barre de charge. Youpi ! Mais, pour nous donner bonne conscience, nous sommes repartis faire des boucles dans le 19e arrondissement, agrémentées d’une cinquantaine de tours de parking et une vingtaine d’allers-retours le long de la piste cyclable. Au bout de 57 km, la roue s’est enfin mise à biper, mais avançait encore vaillamment. 60 km : l’alarme s’intensifie, pour émettre 2 bips toutes les deux secondes environ, signifiant qu’il ne reste alors plus que 10 % de charge. De quoi rendre fous les collègues qui, de leur bureau, vous entendent faire des allers-retours dans la cour intérieure, à pester contre cette batterie qui ne veut pas mourir. 63 km : miracle, la dernière barre s’éteint… pour être aussitôt remplacée par un clignotement simultané des quatre diodes ! Et toujours ces bips stridents. C’est finalement peu après 66 km que nous avons jeté l’éponge : non pas parce que la batterie était vide, mais parce les repose-pieds s’étaient tellement redressés que la position de conduite en devenait intenable. Bravo, Gotway, nous sommes bluffés. Et nous sommes persuadés que, sur du plat et un terrain régulier, avec un pilote ne faisant pas exprès de mettre en difficulté la roue, celle-ci pourrait aisément tenir 75 km. De quoi tomber éperdument amoureux du vilain petit canard rencontré le premier jour…
Pour l’anecdote, sachez que ce test d’autonomie s’est plutôt révélé être un test d’autonomie machine contre homme contre iPhone. Pour ma part, je déconseille de rouler plus de 4 heures sans faire de pause, à moins d’avoir une condition physique béton, des genoux et des cuisses en acier. Pour l’iPhone, il nous a fallu le recharger deux fois durant le test car, avec Runtastic et Deezer en arrière-plan, sa batterie s’épuisait plus vite que celle de la GotWay !