Les Numériques – 11/12/2015
Bruno Labarbere
Pénalisée par ses pédales dessinées avec les pieds
La première Gotway en 14″ avait marqué les esprits par sa robustesse et son autonomie qui, pour le modèle en 680 Wh, pouvait grimper jusqu’à 70 km. Mais il faut l’avouer, elle était assez disgracieuse et inconfortable, la faute à son design cubique et ses batteries très encombrantes. Sa remplaçante, la MCM4, s’affine, adopte une forme ovoïde bien plus élégante, un moteur plus puissant (1800 W en crête et non plus 1000 W), une autonomie généreuse, tout en gagnant des leds et un système de tilt-back qui remonte (enfin) les pédales une fois la vitesse limite atteinte ! Bref, de quoi la catapulter directement à cinq étoiles… Sauf qu’en fait, non.
CARACTÉRISTIQUES
Autonomie annoncée 60 km
Batterie 680 Wh
Poids 12.8 kg
Temps de charge 5 h
Vitesse maximale 32 km/h
Puissance du moteur 800 W
PRÉSENTATION
Avec sa MCM4, Gotway confirme sa fidélité au format 14″, très populaire grâce à l’agilité qui a fait son succès. Cette nouvelle roue est également l’occasion de faire un grand bond en avant du côté de l’ergonomie et de la sécurité, face à une concurrence de plus en plus performante et mieux étoffée.
CONFORT ET ERGONOMIE 3/5
L’histoire se passe à Suzhou, à l’ouest de Shanghai, dans un bar où l’équipe de Gotway a l’habitude de se retrouver après une dure journée de labeur. Après quelques tournées bien méritées, la conversation s’anime et l’un des ingénieurs s’écrie « vous savez, ce serait pas mal que la remplaçante de la MCM 14″ soit un peu jolie », et toute la compagnie d’approuver. « Bon, par contre, j’ai pas d’idée pour le design… Des suggestions ? » Un des plus vieux employés suggère « nous n’avons qu’à faire comme d’habitude, et copier la Solowheel », mais très rapidement ses collègues le remmènent à la raison « ah non, déjà fait, ça va finir par être remarqué. » Alors que tous font fonctionner leur matière grise, quelque peu embrumée par le houblon malté, une petite voix, dans un coin de la table, murmure « Solowheel, oui, mais ce qui marche en ce moment, c’est la Ninebot One. Alors, euh… voilà. » Passée la surprise, tout le groupe s’enthousiasme « mais oui, excellente idée ! Faisons comme ça, va pour la Ninebot One ! Mais bon, on va la modifier un peu, sinon on va nous accuser de plagiat. » C’est ainsi que nous imaginons la genèse de la Nineb… euh, non, de la Gotway MCM4.
En effet, même en feignant la cécité, difficile de ne pas voir l’étrange ressemblance entre la roue de Gotway et celle de Ninebot, surtout dans sa livrée blanche laquée — il existe une version noire mate du plus bel effet. La MCM4 a l’air d’une One qui serait passée à la presse, lui conférant sa forme ovoïde et non pas circulaire. De la Ninebot, la Gotway reprend donc la coque laquée blanche, le ruban de leds qui ne se trouve non plus sur chaque flanc mais au centre. L’intégration est moins réussie et un peu grossière, mais les différents modes d’éclairage sauvent la mise.
Notez qu’il n’est pas possible de personnaliser les couleurs affichées. Notez également que ces leds servent de témoin de charge — à l’avant — et de feu de freinage à l’arrière — lorsque vous décélérez, l’arrière de la roue s’éclaire en rouge. Ces leds sont protégées par des caches en plastique noir fumé assez fragile, dont la pellicule de protection s’écaille très rapidement. Heureusement, elles sont remplaçables pour un coût modique. Si la MCM4 a donc une allure assez plastique, tranchant avec son aînée plutôt rustique, notez qu’elle n’en demeure pas moins très solide. Par contre, et c’est sans conteste la partie la plus regrettable, le mimétisme avec la Ninebot One se retrouve jusque dans les repose-pieds. Or, cette dernière partie, très importante pour le confort et la précision de conduite, est le gros point faible de la Ninebot.
Les fameux repose-pieds qui, sous la pluie, pourront causer de fâcheuses surprises.
Sur la MCM4, cet élément est encore pire, et pas que par un seul aspect. D’abord, les stries usinées dans le métal présentes sur toutes les roues Gotway jusque-là font place à des inserts en caoutchouc, trop légèrement rainurés… comme chez Ninebot. Neufs, ils manquent cruellement d’adhérence et il faut serrer très fort la roue entre les mollets pour ne pas glisser. Fort heureusement, Gotway a pensé à insérer de petits mais très confortables coussinets pour adoucir la conduite et ne pas agresser le haut des mollets. Bien vu. Le problème de grip des repose-pieds se résorbe tout seul après 250 km environ, l’usure naturelle du caoutchouc faisant effet. Mais cela ne règle pas un autre problème : le dessin adopté pour ces pédales et les aimants qui les retiennent contre la roue sont si puissants qu’il est très difficile de les abaisser, en roulant, du bout du pied.
Dommage car, dans certaines situations, rouler sur un pied permet de gagner un peu en largeur. Oui, parce que la MCM4 est très large, ailes déployées, pour une roue de 14″, mais rassurez-vous, il y a pire encore : ces fameux repose-pieds cumulent les défauts puisqu’en plus ils sont positionnés trop bas. La garde au sol très faible pose de nombreux problèmes : dans les virages serrés, les pédales frottent par terre. Lorsqu’il faut monter ou descendre sur un trottoir, il faut bien faire attention à être perpendiculaire à la bordure, sinon les pédales ont tendance à taper contre le sol. Lorsqu’il faut passer d’une piste cyclable à un trottoir, un virage mal négocié et trop serré peut faire cogner les pédales contre la bordure. Ce n’est vraiment pas pratique et si, avec la pratique, on prend l’habitude de ralentir au maximum et de tourner presque à l’arrêt, l’opération fait perdre en fluidité. Dommage.
La prise USB intégrée est bien pratique pour recharger son smartphone en cas d’urgence.
Heureusement, cette MCM4 se rattrape avec une nouvelle application (toujours uniquement compatible Android), plus esthétique et mieux pensée. Celle-ci permet de contrôler, en temps réel, sa vitesse, la distance parcourue depuis le dernier allumage, la distance totale parcourue par la roue depuis sa mise en circulation, le niveau de batterie et la température du système. Petit bémol sur la version graduée en kilomètres : les ingénieurs sont tellement optimistes qu’ils ont gradué le compteur jusqu’à 50 km/h. Du coup, lorsque l’aiguille est sur 25 km/h, elle masque l’indicateur numérique de la vitesse… C’est un détail mais, sachant que 25 km/h sera bientôt la vitesse maximale limitée par la réglementation européenne, c’est un peu dommage. Outre l’aspect monitoring, cette application permet également de régler quatre éléments fondamentaux : le mode de conduite, la vitesse à laquelle le tilt-back (remontée automatique des pédales) intervient, l’apparition et le nombre des bips, la calibration horizontale. C’est assez bien pensé, simple d’accès, mais l’algorithme n’est pas exempt de défauts, nous allons y revenir tout de suite.
Les leds ne sont pas là pour voir mais être vu. Elles s’éclairent selon cinq modes, dont un statique pour connaître le niveau de charge de la batterie, deux dynamiques qui tournent à la même vitesse que la roue et un avec effet « K 2000 ».
CONDUITE 4/5
Avec son moteur de 800 W en moyenne et 1800 W en crête, la MCM4 offre une sensation de conduite plus douce et fluide que celle de son aînée. Sa puissance supplémentaire permet de franchir avec bien plus d’aisance les pavés et les dénivelés à faible vitesse. D’une manière générale la MCM4 se montre plus progressive, avec une conduite plus enroulée et sécurisante, du moins en ligne droite, puisque dans les virages un peu serrés le problème des repose-pieds, évoqué précédemment, vient ternir le bilan. Nous apprécions tout particulièrement la grande stabilité de la roue lorsqu’il faut avancer au ralenti, par exemple pour suivre un piéton à son allure, sur un trottoir. Pour le coup, le positionnement des pédales permet d’abaisser le centre de gravité et de gagner en stabilité.
Comme d’habitude chez Gotway il est possible d’opter pour trois modes de conduite. Les dénominations ont légèrement été modifiées et le mode « Madden » s’appelle désormais « Performance », secondé par les modes « Confort » et « Souple ». Nous avons une très nette préférence pour le mode « Performance », qui permet une conduite plus précise et réactive. Néanmoins, certains pourront regretter sa relative souplesse, à la fois par rapport au mode Madden des autres Gotway et surtout par rapport à la dureté de la position 0 sur les Ninebot One. C’est une histoire de goût mais, pour notre part, nous avons beaucoup aimé… sauf dans certaines circonstances.
Ainsi, lorsque vous redémarrez après un virage serré, la MCM4 a tendance à légèrement cabrer, ce qui n’est pas très plaisant. Cela est également dû au tilt-back qui s’enclenche, puisque la roue détecte une accélération brutale. Ce tilt-back intervient, d’une manière générale, un peu trop tôt. S’il est possible de le régler à 24 km/h, il a tendance à tellement durcir les pédales qu’il donne l’impression de devoir forcer pour faire avancer la machine, alors que les 24 km/h ne sont pas encore atteints. Attention : ce tilt-back n’est pas un limitateur de vitesse, il sert essentiellement à vous prévenir, mais ne vous empêchera pas, si vous poussez suffisamment, de monter jusqu’à la vitesse maximale de 32 km/h. Au-delà, attention aux risques de coupure et aux vols planés ! De fait, même s’il est possible de complètement désactiver le tilt-back, nous vous le déconseillons — sauf si vous roulez sur piste fermée et dépourvue d’obstacles.
En conduite, un autre défaut de la MCM4 est commun à toutes les Gotway : les bips. Ceux-ci ont pour objectif de vous prévenir lorsque vous roulez un peu trop vite. Ils se déclenchent à 23 km/h, vitesse très rapidement atteinte, puis la cadence des bips s’accélère : 1, 2, 3 puis 4 bips par seconde. Le problème, c’est que leur apparition est mal étagée et, pour peu que vous rouliez sur une piste cyclable dégagée à une vitesse de croisière aux environs des 25 km/h, vous vous condamnez à devoir supporter ces bips stridents en continu. C’est très agaçant pour vous et très anxiogène pour les autres utilisateurs de la voie. Il est possible, via l’application, de supprimer les deux premiers bips, mais cela change finalement peu à l’affaire.
AUTONOMIE 5/5
À cause de la météo parisienne lors de notre mois de test, nous n’avons pas pu, comme à notre habitude, tester l’autonomie d’une seule traite, sur un parcours unique, ce qui aurait nécessité au moins cinq heures de beau temps continu. Nous avons donc vidé la batterie en plusieurs fois et nos résultats sont cohérents, aussi bien avec la capacité de la batterie (680 Wh), qu’avec notre expérience et la météo. Sur une 14″ de première génération, cette même batterie permet de rouler jusqu’à 70 km. Plus lourde (12,8 kg) et plus puissante, la MCM4 doit logiquement tenir moins longtemps. Si en plus nous ajoutons la température ambiante, en moyenne autour des 6°, il est évident que la MCM4 est moins autonome que son aînée, testée au printemps, avec une météo bien plus clémente. Il n’en demeure pas moins que, dans ces conditions, pour peu que vous pesiez dans les 80 kg, vous pouvez sans crainte rouler 50 km avec une seule charge. Gotway demeure le champion de l’autonomie. L’honneur est sauf.
Existe aussi en version 340 Wh
Comme d’habitude Gotway propose ses roues en plusieurs variantes, qui se distinguent par les capacités de leurs batteries. La MCM4 340 Wh est donc, logiquement, deux fois moins autonome que son aînée et ne tiendra « que » 30 km… ce qui est déjà beaucoup mieux que la majorité des roues du marché. Par rapport à la 680 Wh, elle est un peu plus légère (12 kg contre 12,8 kg), plus rapide à recharger (2 heures contre 5 heures), et moins chère à l’achat puisqu’elle est vendue 990 € (contre 1290 €). Elle offre, par contre, les mêmes prestations en termes de confort, d’ergonomie et de conduite. Une option intéressante pour ceux qui ne sont pas de gros rouleurs.
POINTS FORTS
Confort des supports latéraux.
Leds bien visibles et indiquant la charge.
Excellente autonomie.
Moteur puissant et silencieux.
Grimpe des pentes jusqu’à 25°.
Tilt-back à 24 m/h.